Elisabeth Lombard artiste peintre
Il y a « l’officiel », l’unique auquel on se réfère, celui qui se donne à voir et à revoir comme gage de sa linéarité plastique, de sa légitimité aux yeux du regardeur et des professionnels de l’art. Et puis il y l’autre - tous les autres contenus dans un même artiste - le discret ; celui qui se dévoile ici en s’excusant un peu. Tels ces masques sortis tout droit de l’atelier pour contrebalancer, pour accompagner dans la troisième dimension la douceur d’un profil dessiné qui gagne ainsi sa part d’ombre et de mystère.

UNE VOYAGEUSE EN APESANTEUR

“Son œuvre symbolique, au médiéval surréaliste” pratique le repliement créatif et l’alternance d’écritures. Son univers intemporel, sur les traces d’un paradis perdu, signe l’approbation d’un reliment moderne dans lequel hommes et bêtes s’interfèrent et se côtoient, masqués, parés, tatoués dans un univers en suspension. Figures totémiques, animaux aux yeux d’humains, humains indifférenciés au menton-galoche, l’animal retrouve ici ses lettres de noblesse.
 

Ce compagnonnage essentiel, échafaudage énigmatique d’une histoire sans parole, parle d’un répertoire de Signes d’avantage qu’un bestiaire énoncé, identifiable. D’une mythologie toute personnelle fruit d’un imaginaire qui s’est mis en place dans le travail du peintre nourrit aux laits du Bassin Méditerranéen, aux grands desseins de la préhistoire en passant par les dessins des grottes de Tassili dans le désert , et revenant sur ceux des poteries antiques ou des peintures iraniennes.

La toile n’étant jamais tout à fait vierge – lui donner une antériorité de caverne – elle se fait plaque sensible d’un art pariétal préexistant que révèle le crayon, la plume ou le pinceau. Eloge des courbes, pureté des profils, alors qu’ailleurs les droites obscures et les méandres des traits cassés écrivent sur le blanc, sur l’indigo de l’image – architecture oblige – une trame bâtisseuse.

« L’art des ailleurs » frappe à ma porte ; yeux, bouches sont malmenés, liés ; moins par cruauté que pour libérer le geste contenu certes, mais rebelle. Et véhiculer un exotisme revisité : Levis Strauss parlant de « génial » bricolage et le peintre de « désapprentissage ».

E. Lombard

JEUX DE FORMES ET DE FONDS

La toile comme tapisserie moderne, amnésique, s’affranchit de son décoratif.  Une trame obsessive en structure l’espace, se fait par endroits l’outil de sa déconstruction. Ordre et désordre, le trait entre droites et courbes jouit d’une liberté de terminaisons.

Chaque image hantée par son hors champ, fonctionne à la manière d’une pièce unique. A l’envers du décor des liens se tissent qui lui confèrent par extension une contemporanéité de propos.  Certaines sont  à considérer dans leur inachèvement, d’autres dans le “trop” de leurs finitions. En écho à une tribalité revendiquée, une facture maniériste pourvoyeuse de détails et de préciosité.  

Les outils rudimentaires, artisanaux : de la poudre au charbon, du gras au maigre, le papier Xuan imprimé, assurent à l’image une épaisseur sémantique et perceptible.  Une sorte d’archéologie immédiate, strates sur strates, couches sur couches. Les papiers y jouent à minima de leur transparence … Repentirs dévoilés ou masqués.

 

Piocher dans ce réservoir mythique est un acte d’auto-construction. Comme peut l’être le fait de faire. Il ne peut y avoir de création sans attente de voir surgir le mot consolateur. L’animal à ce titre nous apaise.

M. Gondebaud

PARCOURS

Enfant de la ligne claire, Matisse/ Hergé.
De peintre (Jean Lombard/ Ecole de Paris), académiciens, anthropologue et tisserands.
Passionnée d’Arts Premiers, de traditions orales.
Rencontre le taureau de Lascaux et la vierge bleue de Chagall.
Voyage entre soies de Chine et de Lyon.

Elisabeth Lombard artiste peintre

1999/98
Diplôme d’architecte/ Mémoire de fin d’études : «Un musée d’architecture dans les Halles Freyssinet »/ UP6 Paris/ Versailles
DEA “jardins, paysages et territoires”/ Mémoire : «L’habitat vernaculaire du Marais Vernier »/ UP6 Paris/ Ecole du paysage/ Versailles

2005/01 
Ecole Glacière/ Atelier Martin BISSIERE/ Beaux Arts de Paris (dans la lignée de Roger et Loutre BISSIERE/ peintres). Années jubilatoires de ‘Désapprentissage’. Oeuvres d’abstraction libre, de grands formats.

2004 
Quitte Paris pour un atelier personnel Toulousain.
Voyage en Afrique, fait dessiner les habitants troglodytiques.
Les personnes Alzheimer/ de 2014 à 2010.
Résidence dans le cadre d’Octobre Bleu/ “La gestuelle à l’œuvre”/ EHPAD/ Saint-Martin-du-Touch (31).

2006
Renoue avec l’objet ; vêtures, bibliothèques et portraits. Plongée autobiographique. Se fabrique un vocabulaire de peintre qui bouscule les “acquis”.

2014
DU d’art thérapie/ Docteur Granier/ Mémoire : «Ce qu’ils ont à nous apprendre»/ Purpan (31). Immersion en milieu psychiatrique/ participe aux Ateliers d’art-thérapie. 

Depuis 2015
Encadre des ateliers peinture – écriture/ public en “fragilités”/ Adoma/ Toulouse (31).                                                                                                                 

Depuis 2018 Membre de l’association des AEB/ Toulouse (31).

2020  Formation Animation d’ateliers d’écritures/ Annick Fischer/ «L’écriture de soi».

2022 Sélectionnée dans le livre LES 30 ARTISTES 2022 (Occitanie).

ATELIERS. PERFORMANCES. RÉSIDENCES.

8 années d’accompagnement et d’actions auprès d’un public en fragilités, ont valu aux acteurs(trices)/ intervenantes, une production d’œuvres d’exception ; en marge, proche de celles de l’Art Brut, laissée à la pleine appréciation de leurs auteurs : personnes profanes et de talents… Aujourd’hui à la faveur d’un partenariat avec la CMS, le résultat de ce Travail voit (enfin) le jour dans une galerie, un contexte non «bricolé» valorisant – si besoin était – leurs créateurs(trices).

Elisabeth Lombard “éveilleuse de peinture” qui se dit volontiers en marge, a souhaité durant ces années de collaboration récréer au sein de ces Ateliers l’esprit des lieux… Conforme à l’idée qu’elle se fait d’une création de qualité, parce qu’y sont réunies les conditions de son éclosion et le matériel professionnel semblable à celui que le peintre utilise dans l’Atelier.

Dans ce contexte, sont nées dans la confiance partagée, des images-frises sur grandes toiles libres de lin et coton cru. Nous invitons le regardeur dans l’étonnement de ces expressions picturales à la fois persévérantes, «naïves» et sincères..